Une autoroute près de l'agglo ! Est-ce bien raisonnable ?

Publié le 17 avril 2006 par CARL et BOURDILLON

Quelques extraits d'un courrier envoyé par des tourangeaux du secteur T. Cet article devrait faire réfléchir les Blésois à l'heure de la finition du carrefour du Verdun. Et toute les agglomérations qui rêvent du modèle autoroutier...

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Tours, le 13 avril 2006

Objet : IKEA, oui mais pas comme çà

Monsieur le Président,

Le développement durable n’est pas qu’un mot marketing, vous en êtes convaincu, lors de votre cérémonie des vœux 2006, cela était dans l’air. Vous êtes conscient que la planète ne va pas bien et vous voulez nous aider à en prendre conscience en changeant nos comportements. C’est pour cela que vous nous donnez le bon exemple à chaque fois que nous avons la joie d’ouvrir le magazine Tour(s)Plus MAG. Un coup, on vous y voit faire du vélo, un autre, on nous propose gratuitement des composteurs, et n’oublions pas non plus que c’est dans ces mêmes pages, qu’on nous a proposé un sac non jetable pour éviter les sacs plastiques. Mais depuis le dernier Tour(s)Plus MAG, celui de janvier, cela dérive dans le mauvais sens.

Rappelons le contexte : il était une fois un secteur T pollué par 55 microgrammes d’oxydes d’azote à cause d’une méchante autoroute A10 que tout le petit monde politique tourangeau considérait comme une erreur majeure (une autoroute en plein centre d’agglomération, était-ce bien raisonnable ?). Ce pauvre petit secteur T avait tant de mal à trouver le repos, lui qui voit défiler à longueur de journée jusqu’à 75000 véhicules par jour sur cette saleté d’autoroute. Il n’avait vraiment pas de chance car il était aussi bordé par une avenue qui elle aussi amenait son lot de pollution et de bruit.

Comment en étions-nous arrivé là ? Il y a moins de cent ans, certains riverains se rappellent comme c’était calme. On vivait proche d’un canal. Jusque dans les années 60, .... le canal alors asséché accueillait la foire de Tours une fois par an. Puis la démesure a commencée : une autoroute de 2x2 voies s’installa dans le canal, on construisit juste à coté une avenue de 2x2 voies. Ce n’était pas assez, on passa l’autoroute en 2x3 voies, les camions espagnols l’envahirent dans un vacarme terrible. On autorisa même les camions sur l’avenue Pompidou pour desservir la ZI des Yvaudières à Saint-Pierre-Des-Corps. Et, pour parfaire le tableau, on eut droit à l’implantation d’un magasin C...... Le cauchemar était là : Au secours, SECTEUR T, on ne peut plus vivre tranquille !

Il y a 3 ans, les choses s’inversèrent. Tout semblait aller dans le bon sens : Les riverains par des batailles régulières sur le terrain réussissaient à faire fléchir le trafic poids lourds (venez nous voir sur la route stopper avec assurance un 38T arrivant à vive allure). Le PPA (Plan de Protection de l’Atmosphère) annonçait également une nouvelle donne : il montrait du doigt le trafic routier (55% de la pollution). Lutter contre ce fait était même considéré comme une priorité. C’est sûr, les politiques ne pouvaient plus que se mettre à la tâche. Trop de voitures, trop de camions donnent trop de pollution : l’hypothèse était démontrée.

Mais c’était compter sans IKEA, ........

Et puis, 4 camions par jour, une goutte d’eau ? Quand on se noie dans le trafic poids lourds comme c’est notre cas, croyez-vous qu’on apprécie qu’il en pleuve 4 de plus ? Rappelons donc la règle de base du SECTEUR T : « ZERO CAMION DANS LE SECTEUR T ».

Visiblement, la responsable du développement économique n’était pas dans la bonne longueur d’ondes ce soir là. Elle n’en finissait pas de nous vanter le commerce, et puis l’argument ultime est venu : Tour(s)Plus avait besoin d’une nouvelle enseigne de meubles.

Donc, voilà IKEA, la grande fierté de l’agglo, le prince du meuble bon marché (épinglé comme toxique dans la revue QUE CHOISIR de janvier 2006 mais passons là dessus), le royaume du commerce éthique (les meubles sont garantis MAX HAVELAAR ?), IKEA, le vendeur qui veut s’installer partout, de la France à la Suisse, du Canada à l’Angleterre. Oyez, oyez, bonnes gens, Tours était triste, elle devient radieuse.

Cette entreprise cherche donc un endroit où elle attirera 1 million de visiteurs, elle cherche, elle cherche et vise il y a quelques années la zone des Atlantes mais rebutée par l’accessibilité autoroutière, elle se tourne vers Chambray, où on n’en veut pas car du trafic là bas, il y en a bien assez comme cela, puis elle revient donc aux Atlantes, et ON (qui, d’ailleurs parce qu’on ne comprend pas vraiment la règle de la décision politique… ) lui dit OUI, on a un bout de terrain, là bas, dans un secteur saturé par le bruit et la pollution, près d’un quartier actif nommé le SECTEUR T, vas-y, c’est bon ! ! ! . Pourtant à cet endroit il y a déjà une fierté locale : un parc des expositions, mais pas grand chose pour IKEA : pas d’entrée d’autoroute ni même une sortie directe. RIEN en termes d’infrastructures routières.

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A qui a t-on demandé son avis ? Pas à Saint-Pierre-Des-Corps, pas au Conseil Général, pas aux habitants qui vont encore voir une hausse du trafic, de la pollution et du bruit. A qui ? A une étude de marché comme cela a été mentionné pendant notre assemblée générale ? Au fait, l’étude de marché prévoit-elle l’aval de tout le monde : c’est à dire de Saint-Pierre-des-Corps, du conseil Général, des habitants directement concernés comme nous, le SECTEUR T, mais aussi des habitants de Saint Avertin ou de l’avenue Richard WAGNER à Tours ? L’étude de marché est-elle compatible avec le développement durable ? Avec le PPA ? Et puis IKEA construit-il en HQE (Haute Qualité Environnementale) ?

Et la sortie sud prévue en 2009 ? Qu’est-ce donc que ce nouveau gadget ? .............Et en attendant 2009, comment fait-on ? On sature encore un peu plus des voies déjà saturées ? On les fait passer par l’avenue POMPIDOU et on jette le projet de passage en 2 voies et la piste cyclable prévue vers 2007 dans la poubelle ? Et en 2009 ? Comment fait-on là aussi si on est un client IKEA avec le coffre plein de meubles en kit ? Comment repart-on vers le sud ? En empruntant l’avenue Pompidou ? Comment remonte t-on vers le nord ? En empruntant l’avenue Pompidou ? Quelle avenue Pompidou ? La nouvelle, celle avec ses aménagements, ses arbres, sa piste cyclable, et sa 2x1 voie ? Ou celle du tout-économique avec des camions bleus et jaunes ? Et si on imaginait ce pauvre client perdu voulant rentrer chez lui, tomber dans une action du SECTEUR T, lui faisant perdre quelque temps, pestant dans sa voiture contre « des cons qui n’ont qu’à déménager » alors que lui habite à 100 kilomètres et ne se rend même pas compte que nous, on vit ici. Aie ! ! Des riverains excédés sont sur la route avec des panneaux « IKEA, tu pollues », « IKEA, pas comme ça », « Tour(s)Plus, qu’a tu fais ? ».

Ça c’est le scénario catastrophe. Nous savons que vous saurez être lucide. Nous savons que les directives européennes sur l’air et le bruit obligent les villes à aller dans le sens du mieux-vivre de nos concitoyens. L’arrivée d’un magasin d’une telle ampleur, si elle est un bienfait pour l’emploi dans notre région, ne l’est pas en matière de mieux-vivre quand il s’agit de l’installer au cœur d’une agglomération déjà saturée. Il faut qu’une solution soit trouvée hors du centre-ville de Tours et hors des communes qui borde la ville sous peine de déporter le problème de l’engorgement des voies d’accès à ces centre-villes.

Déjà des voix se lèvent pour dire que ni CHAMBRAY ni les Atlantes ne sont une solution. Autour de nous, on parle, et on ne comprend pas bien. On nous dit que c’est un peu n’importe quoi quand même. Et au delà de Tours, partout dans le monde, IKEA n’arrive pas les bras ouverts. On avance toujours l’éthique de l’enseigne mais que se soit à Mouans-Sartoux (06), que ce soit à Vernier (en Suisse) pour ne citer que deux exemples récents, des citoyens et des élus qui les représentent dénoncent les arrivées d’IKEA, parce que, comme le disent les Ministres belges de la Mobilité Pascal Smet et Kathleen Van Brempt : « Une société telle IKEA génère chaque jour un trafic routier considérable ».

Depuis quelques mois, l’arrivée des autoroutes A28 et A71 dans le département ont changé la donne. Ce n’est donc pas la place qui manque quand on s’appelle IKEA et qu’on cherche une place à proximité d’une autoroute. Vous le disiez vous-mêmes dans l’éditorial du dernier Tour(s)Plus MAG : «Lorsqu’une entreprise est confrontée à un choix d’implantation, l’accessibilité constitue souvent un critère prédominant ». Aux Atlantes, nous le répétons, l’accessibilité est nulle, déjà saturée. Rien ne s’améliorera avant 2009 et rien ne dit que la solution bancale retenue pour cette date (un quart d’échangeur) est une solution d’avenir. Et puis toujours pour vous citer : « Si IKEA a choisi l’agglomération de Tours, ce n’est pas pour sa douceur de vivre, mais bel et bien parce que plus d’un million de personnes vivent à une heure de voitures », alors IKEA n’a pas fait qu’un choix économique et ce choix peut être changé. Il est en total opposition avec ce que vous avez signé de votre main et qui était lisible sur la lettre n°9 du Vision’Air : « la qualité de l’air nécessite une action globale. On sait combien sa dégradation peut avoir de graves conséquences sanitaires et environnementales. Avec l’élaboration du PPA de l’agglomération tourangelle, (../..) c’est la pérennité de la qualité de l’air qui est visé ».

Pour finir, si le choix d’IKEA se confirme à cet endroit, nous vous demanderons de venir rechercher votre composteur. Si c’est pour nous le polluer encore un peu plus, gardez-le. Nous nous en passerons. Et puis, nous aimerions également savoir si IKEA distribue des sacs plastiques à ses caisses, parce que ce n’est pas toujours aux mêmes à faire les efforts.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma considération distinguée.

Pour le Président,

Alain ROUILLON

Chargé de la communication du CIDRT

cidrt@free.fr